Le devoir de mémoire désigne le devoir moral d’entretenir le souvenir des souffrances subies dans le passé par certaines populations. Cette reconnaissance est essentielle pour que les individus et les sociétés puissent se reconstruire après les crises, et surtout, pour éviter de renouveler les erreurs et les horreurs d’hier. Traditionnellement, ce sont les monuments qui traduisent la volonté publique de rendre visible le devoir de mémoire dû aux victimes et ces monuments sont souvent réalisés, en France, dans le cadre de commandes publiques. Pourtant, ces constructions dédiées au souvenir, massives, imposantes, placées au coeur des villes, semblent devenus inutiles à l’évocation de l’histoire, incapables de réveiller les mémoires. C’est peut-être pourquoi certains artistes contemporains s’interrogent sur la valeur du monument historique à notre époque et sur le moyen de perpétrer le souvenir. Jochen Gerz, par exemple, artiste conceptuel d’origine allemande né à Berlin en 1940, s’est penché sur ce thème du devoir de mémoire de la Shoah, que l’on peut considérer comme l’événement le plus traumatique du XXe siècle. Aussi, le travail de Christian Boltanski, artiste français né en 1944 à Paris, semble imprégné par cette nécessité de remédier à l’amnésie collective. Comment évoquer l’indicible ? Comment visualiser la haine, la peur ? Comment renouveler l’image si peu parlante aujourd’hui du monument aux morts ? Ces questionnements seront au coeur de notre recherche.